Le 8 mai 1914 naissait dans l’ancien empire russe Romain Kacew plus connu sous le nom de Romain Gary (ou encore Emile Ajar). Pour le centième anniversaire de sa naissance, Le Petit Niçois a décidé de revenir sur la vie de ce génie de la littérature, seul double lauréat du Prix Goncourt, avec l’auteur Carine Marret, spécialiste de l’oeuvre et de la vie de Romain Gary.

NICE ENTRE MÈRE ET MER
La France pays des Lumières. La France pays de la culture. La France pays des droits de l’Homme. Quel autre pays pouvait accueillir Romain Gary ? Aux yeux de sa mère, Mina, aucun. Dans cet empire rouge qui est en train de se mettre en place, Romain Gary n’a pas sa place. Il ne pourra pas accomplir son destin. « Sa mère voulait pour lui le meilleur » explique Carine Marret, auteur du livre Romain Gary, promenade à Nice.
« Elle lui avait appris certains textes français comme Les Fables de La Fontaine, et avant même son arrivée dans l’Hexagone, il connaissait les rudiments de la langue. Ecrivain diplomate, elle est persuadé qu’il est voué à devenir quelqu’un d’important. Et le plus amusant dans cette histoire, c’est qu’elle avait raison. » C’est à 14 ans que le jeune homme débarque à Nice avec sa mère.
A cette époque la « French Riviera » est « the place to be », lieu de villégiature hivernale des grands de ce monde. A son arrivée, Romain Gary est tout de suite séduit par cette ville et sa région. « La première chose qui a marqué Romain Gary, c’est la méditerranée. Toute sa vie il gardera un attachement particulier pour elle. Pour lui Nice est le point de rencontre entre le pays imaginé dont sa mère lui parlait tant et cette mer à nulle autre pareil ». C’est dans cette même méditerranée qu’il choisira qu’on disperse ses cendres à sa mort.
NICE OU L’APPRENTISSAGE DE LA VIE
Pour Romain Gary, Nice est sans doute et avant tout l’hôtel-pension Mermont dont sa mère était gérante. Situé sur l’actuel boulevard Grosso, il était le point de chute de nombreux touristes et voyageurs au long cours. Un hôtel qui sera sans doute une fenêtre pour lui, une fenêtre sur le monde. « Il avait aussi l’habitude d’aider sa mère par exemple en allant faire les courses avec elle au marché de la Buffa.
C’était un quartier auquel il était très attaché. Il ne faut pas oublier non plus le Lycée de Nice (aujourd’hui lycée Masséna). A Jamais Nice restera pour Romain Gary le lieu où il a commencé à faire l’apprentissage de la vie. Là ou il s’est construit en tant qu’homme. »
NICE DANS LES LIVRES
Comment parler d’un écrivain sans évoquer son oeuvre. Indiscutablement, Nice et la Côte d’Azur ont eu une influence sur Romain Gary. La plus évidente est révélée dans son livre la Promesse de l’aube dans lequel, il décrit sa jeunesse dans la capitale azuréenne. « Mais l’on retrouve toujours une allusion à Nice dans ses autres livres.
Parfois ce n’est rien, un paragraphe, voire même une simple phrase, mais Nice n’est jamais loin… » précise Carine Marret. Et effectivement l’on retrouve plusieurs références à sa cité d’adoption dans ses autres oeuvres. C’est le cas par exemple de l’emblématique hôtel Negresco dont il est question dans « Les clowns lyriques ».
ROQUEBRUNE, SON REFUGE
Si les Niçois veulent garder, jalousement, la mémoire de Romaine Gary, l’honnêteté intellectuelle et historique nous pousse tout de même à rappeler que la capitale azuréenne n’était pas le seul endroit de prédilection de l’auteur sur la Côte d’Azur. En effet, quelques kilomètres plus à l’Est, Romain Gary et sa femme Lesley Blanch avaient acheté une demeure dans la commune de Roquebrune-Cap-Martin. « C’était une tour de guet, de trois étages.
Au sommet se trouvait le bureau de Romain Gary. Une pièce minuscule et vétuste qui disposait néanmoins d’une vue à couper le souffle ». C’est dans cette tour que l’auteur a écrit la majeure partie de son premier Prix Goncourt, Les Racines du ciel. Dans la vieille-ville médiévale, l’âme de Romain Gary èrre toujours, et ils ne sont pas rares ce qui disent l’avoir aperçu…
EMILE AJAR ET NICE
Impossible de parler de Romain Gary sans évoquer son alter-égo Emile Ajar. C’est avec ce fameux pseudonyme qu’il avait signé son roman La vie devant soi et qu’il a obtenu son second Prix Goncourt. Toujours est-il que même sous couvert de l’anonymat, il ne pouvait s’empêcher d’évoquer Nice. Dans ce livre il fait plusieurs fois références au Carnaval de Nice, tandis que dans L’angoisse du Roi Salomon, Nice apparaît comme une sorte d’El Dorado.
ROMAIN GARY AUJOURD’HUI
À la fin de la Seconde Guerre Mondiale, lorsque la Reine d’Angleterre demanda à Romain Gary « d’où venez-vous ? » ce dernier répondit « De Nice » tout simplement. Et il est vrai que son histoire personnelle est indissociable de celle de la cité. L’influençant dans son travail et dans sa vie, Romain Gary restera attaché à Nice jusqu’à sa mort.
Dans le quartier de son enfance, sa présence reste vivace et des témoins de plusieurs degrés se remémorent encore aujourd’hui son passage. Un passage que la ville n’a pas oublié puisque l’ancien hôtel-pension de son enfance porte une plaque pour rappeler aux touristes qu’il y a vécu. La bibliothèque Dubouchage, quant à elle, a été rebaptisée à son nom, sans doute le plus bel hommage que l’on puisse faire à un écrivain.
En ce centième anniversaire de sa naissance, cet homme n’a jamais été aussi vivant qu’aujourd’hui. De la part de tous les Niçois, la rédaction vous remercie. Vous nous avez bien amusé.
Carine Marret , Romain Gary : Promenade à Nice et actuellement en librairie avec le polar de poussière et de cendre.