LE PETIT NICOIS

Un Azuréen vient de tout quitter pour aller combattre les terroristes de l’Etat islamique en Irak

Malgré l’intervention de la coalition internationale, L’Etat islamique continue de faire chaque jour de nouvelles victimes. Ferhad, un Azuréen de 56 ans, ne pouvait se résoudre à voir ces terroristes perpétrer chaque jour des horreurs et massacres au Kurdistan. Ce réfugié arrivé en France pour échapper au génocide kurde, commis par les troupes de Saddam Hussein en 1988, a décidé de tout quitter pour aller porter « secours à ses frères et sauver le monde de ces barbares ».

Ferhad scrute l’horizon dans la lunette de son fusil-mitrailleur. Dissimulés derrière les sacs de sable de leur poste avancé, lui et trois autres combattants volontaires encadrés par l’armée kurde s’assurent qu’aucun djihadiste ne tente d’avancer depuis Zoumar, cette petite ville du Kurdistan, proche de Mossoul et tombée aux mains des terroristes.

Ferhad, 56 ans, ce maçon musulman d’origine kurde, a quitté la Côte d’Azur il y a quatre mois pour venir combattre les « fous » de l’Etat islamique. « En France, où je vivais depuis plus de 20 ans, j’ai laissé mes sept enfants. Je me dois d’être là pour aider mes frères, sauver mon pays mais aussi le monde de ces terroristes sanguinaires », explique-t-il avec conviction.

C’est seul, sans réseau d’acheminement, qu’il a rejoint le Kurdistan par la Turquie. « Les Turcs nous laissent passer. Il n’y a pas d’interdiction.

Et puis, ça les arrange que nous soyons là pour arrêter la progression des djihadistes ». En 1988, quelques mois avant de trouver refuge en France, près de Saint-Nazaire, grâce à l’engagement de Danielle Mitterrand pour la cause Kurde, ce peshmerga avait déjà combattu les troupes du régime irakien de Saddam Hussein qui perpétraient alors un génocide chimique qui s’est soldé par la mort de 182 000 Kurdes en six mois.

« Je me battrai jusqu’à la mort s’il le faut » jure Ferhad. « Je ne pouvais pas rester les bras croisés alors que mon peuple est une nouvelle fois confronté à l’horreur ».

Soudain, l’oeil toujours rivé dans la lunette de son fusil, Ferhad aperçoit, à près de 400 m, dans un nuage de poussière, une forme qui se déplace au sol. « Attention ça bouge ! » lance-t-il à ces camarades. Tout le monde se tait et regarde. La « chose » avance, se rapproche. Au bout de quelques minutes, elle devient enfin identifiable.

Ce n’est pas un homme, pas un djihadiste qui tente une attaque solitaire ou suicide comme cela se produit régulièrement. C’est une chèvre. « Il ne faut pas la laisser arriver jusqu’à nous » explique Ferhad. Les terroristes piègent les animaux domestiques, les truffent d’explosifs. Certains en ont récupérés et ont sauté avec ».

Il n’avait jamais tenu une arme dans ses mains

Une balle suffit à tuer l’animal… qui n’était pas piégé cette fois. Ferhad ne touche aucune solde pour son engagement. « Je suis nourri et logé sous une tente par mon bataillon.

Sinon, je me débrouille avec les trois sous que j’avais de côté et l’aide de membres de ma famille ». Ferhad, comme les autres « Français » engagés dans ce conflit, est régulièrement congratulé par la population.

« Bien qu’ils nous appellent les étrangers, les gens viennent nous voir, nous taper dans le dos pour nous dire « bravo, merci » et nous montrer en exemple. Ils nous disent de remercier la France, cette fidèle amie qui ne les laisse jamais tomber comme lors du génocide ».

Danyar, 33 ans, platrier à Angoulême, a lui aussi rejoint l’armée kurde. Il y a quelques mois encore, il venait rendre visite à Ferhad et sa famille sur la Côte d’Azur. « Souvent, on se disait on ne peut pas rester comme ça devant notre télévision à regarder ce qui se passe là-bas ». Tout comme Ferhad, qu’il a connu en 1988 dans un camp de réfugiés en Turquie avant de trouver asile en France, il est de confession musulmane.

Ce père de quatre enfants a rejoint la région de Mossoul en septembre. Il n’avait jamais tenu une arme dans ses mains. « En quelques jours, j’ai appris à tirer à la Kalachnikov. Mais, ce qui m’intéresse surtout c’est de faire de l’humanitaire en qualité de traducteur interprète », explique ce combattant qui était mercredi en opération à Semahama, un village situé à quelques centaines de mètres du barrage de Mossoul.

« Les terroristes veulent reprendre le barrage d’où nous les avons chassés. Ils ont déployé une trentaine de mitrailleuses et ils nous ont tirés dessus dans la nuit », explique le jeune homme par téléphone et sous le sifflement des balles. Pas de quoi lui faire peur. Danyar a pris part à la libération de Rabia. Alors, il peut tout affronter.

« On ne remerciera jamais assez la France »

Libérée depuis quelques jours seulement, grâce à l’appui des frappes aériennes de la coalition internationale, la localité frontalière avec la Syrie a été mise à feu et à sang par Daesh. « J’étais épaule contre épaule avec un officier lorsqu’il a eu le bras transpercé par une balle. Ça fait peur sur le moment.

Mais, malheureusement, on finit par s’habituer. » Une autre fois, Danyar a été projeté par le souffle d’une violente explosion. Avec une unité de son bataillon, ils encerclaient une maison dans laquelle s’étaient retranchés des terroristes. « L’un d’eux est sorti et s’est fait sauter en courant sur nous. J’ai été propulsé à 15 mètres. J’ai encore des problèmes d’audition. »

Danyar espère que « des troupes de la coalition interviendront au sol parce que les hommes de Daesh se servent des populations comme boucliers. Pour se déplacer, ils font monter des civils dans leurs véhicules et, du coup, cela empêche les frappes aériennes.

Et puis, ils se cachent dans les villages, chez les gens qu’ils prennent en otage ». Emir, dont la famille a reçu des menaces de morts depuis son engagement en Irak, insiste pour dire : « On ne remerciera jamais assez la France ! Marquez-le dans les journaux ! », s’exclame-t-il, « fier d’être Français et Kurde ou Kurde et Français ».

Comme Ferhad, il jure qu’il donnerait tout autant sa vie « pour sauver la France si elle était un jour menacée ». Quand compte-t-il rentrer et revenir « profiter de la douceur de la Côte d’Azur ? « Lorsque la liberté sera revenue.

Quand, comme avant, vrais musulmans, chrétiens, juifs… tout le monde sera libéré du joug des terroristes barbares et que le Kurdistan vivra dans cette démocratie à laquelle la quasi totalité des gens aspirent ».

Photo : Ferhad, en plein combat contre les terroristes de l’Etat islamique. ©DR

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